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Balutchukamba
Petit bonhomme court Vole, saute, virevolte Impossible de l'attraper Même en rêve |
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Balutchukamba est un petit bonhomme qui vit dans les montagnes du Tibet.
Pas plus grand qu'un avant-bras, il est habillé comme un moine. De la bonne couleur.
Balutchukamba court très vite. Personne n'arrive à le rattraper.
Lorsque par le plus grand des hasards on l'entre aperçoit au milieu de la brume des montagnes, on a l'impression de voir trois jambes qui tournent à toute vitesse autour de son corps.
Les anciens racontent que celui qui parviendrait, par chance, à le capturer, pourrait lui demander de réaliser son vœu le plus cher.
Il faut faire très attention avec les vœux. Mieux vaut se préparer, à l'avance. Au cas où un jour on devrait dire à Balutchukamba, dans l'urgence, sans réfléchir, quel est notre vœu le plus cher.
Un jour, Pema, le chef du village, parvint à arrêter Balutchukamba en marchant sur sa robe.
Balutchukamba était très vexé. C'était la première fois que ça lui arrivait.
En bougonnant, il demanda à Pema quel était son vœu. Puisqu'il fallait bien que l'histoire se passe telle que les anciens et la tradition l'exigeaient.
Mais il n'était pas content du tout de s'être laissé piéger.
Pema lui dit : "J'ai bien réfléchi. Voici mon vœu : je souhaite que tu remplisses mon grenier d'orge, car je voudrais en tirer du malt, pour faire de la bière. Et en vendant de la bière à tous les hommes du village, je deviendrai riche.
- Pas de problème, répondit Balutchukamba, ton vœu sera exaucé."
Et Balutchukamba fit le nécessaire.
Durant la nuit, il y eut un orage tellement violent que la maison de Pema fut complètement détruite. Le toit s'envola et les murs s'effondrèrent. Au matin, lorsque Pema se réveilla, il n'y avait plus rien autour de lui. Même sa paillasse s'était envolée.
Il était tellement brisé qu'il avait l'impression d'avoir été battu et maltraité avec la plus grande brutalité durant son sommeil.
Horrifié, il appela Balutchukamba en criant "Mais que s'est-il passé ?"
Balutchukamba répondit : "Tu m'avais demandé de faire passer au-dessus de ton grenier un orage, car tu souhaitais être maltraité. Et bien, c'est fait.
- Mais pas du tout, je t'ai dit : de l'orge pour faire du malt.
- Ah non, j'ai très bien entendu "orage" et "maltraité."
Le débat dura tout le jour, toute la nuit, et encore le jour suivant.
Le soir d'après, Pema s'était tant épuisé à discuter qu'il en était mort. Comme cette mort était un peu particulière, les hommes du village, contrairement aux coutumes des montagnes du Tibet, décidèrent de lui construire un cercueil. Et comme chacun sait que le cercueil se dit aussi "bière", ce fut ainsi que le vœu de Pema, tel que l'avait compris Balutchukamba, fut réalisé jusqu'au bout.
Balutchukamba, lui, allait très bien. Il était content. Il avait réalisé le vœu qu'on lui avait demandé, du moins en était-il persuadé, et il se disait que finalement ça n'était pas si terrible que ça de se faire attraper et de réaliser les vœux les plus chers des humains.
Comblé, il quitta le village de Pema. Et retrouva sa vie de course folle sur les hauts sommets enneigés du Tibet.
Depuis, plus personne n'a attrapé Balutchukamba. Il faut dire que plus personne n'a vraiment essayé.
En fait, ce que les anciens avaient oublié de raconter – parce que, parfois, les anciens perdent un peu la boule, il faut bien le dire –, c'est que Balutchukamba était sourd de l'oreille gauche. Ainsi quand on lui disait, par exemple, "miel", il comprenait : "sel", ou "mort" pour "or", ou encore "élimination" pour "illumination".
Je vous le disais : il faut faire attention avec les vœux